Pourquoi et pour qui demander une reconnaissance auprès de la MDPH ?

Être reconnu comme personne en situation de handicap par la MDPH (Maison Départementale des Personnes Handicapées), c’est un geste clé quand sa santé, ses capacités physiques, sensorielles, psychiques ou intellectuelles rendent la vie quotidienne ou professionnelle plus complexe. À la croisée de la santé, du social et de l’accompagnement, la MDPH est l’acteur central du parcours de compensation du handicap en France.

Selon la CNSA (Caisse Nationale de Solidarité pour l’Autonomie), plus de 4,6 millions de personnes représentent la population éligible à des droits auprès de la MDPH (Source : CNSA). Or, chaque année, beaucoup hésitent ou renoncent à faire la démarche, par manque d’information claire ou face à la complexité ressentie. Pourtant, la reconnaissance par la MDPH permet l’accès à des droits, des aides financières, des accompagnements, ou encore des dispositifs éducatifs ou professionnels adaptés.

  • Adultes concernés par une maladie chronique invalidante, un trouble moteur, sensoriel, psychique ou intellectuel
  • Enfants en situation de handicap (pour accès aux aides scolaires, sociales et allocation spécifique)
  • Proches aidants souhaitant être soutenus dans leur accompagnement

La MDPH : quelles missions et quels dispositifs ?

Créée par la loi du 11 février 2005, la MDPH est présente dans chaque département français (service-public.fr). Elle a pour missions principales d’informer, d’accueillir, d’évaluer, d’orienter et d’accompagner les personnes en situation de handicap, quels que soient leur âge ou le type de handicap concerné.

  • Évaluation des besoins et ouverture de droits : c’est la porte d’entrée aux aides (AAH, PCH, Carte Mobilité Inclusion, orientation professionnelle et scolaire, etc.)
  • Conseil et orientation : mise en place de plans personnalisés pour l’inclusion scolaire, professionnelle, sociale (PPS/GEVA-Sco, etc.)
  • Accompagnement administratif : constitution et gestion des dossiers, suivi dans la durée

Chaque MDPH dépend du Conseil départemental, mais le dossier et les démarches sont harmonisées sur tout le territoire.

Déposer un dossier à la MDPH : qui, quand, comment ?

Quelles sont les conditions d’accès ?

Les critères sont simples en apparence, mais leur application dépend d’une analyse individuelle. Il s’agit d’avoir une incapacité substantielle, durable ou définitive, qui entrave significativement la vie quotidienne, la participation sociale, la scolarité, l’accès ou le maintien dans l’emploi (voir Loi 2005-102).

  • Durée : le handicap doit durer ou risquer de durer au moins 1 an (enfants/adultes)
  • Nature : troubles moteurs, sensoriels, psychiques, intellectuels, maladies invalidantes ou rares
  • Conséquences : impact sur l’autonomie ou la participation à la vie sociale

Comment constituer le dossier ?

Depuis 2019, un formulaire national unique de demande est en place (Cerfa n°15692*01). Il faut joindre :

  1. Le formulaire de demande, rempli avec soin (cocher toutes les prestations souhaitées, décrire précisément sa situation et ses attentes)
  2. Un certificat médical spécifique (Cerfa n°15695*01), récent de moins de 6 mois, rédigé par le médecin traitant ou spécialiste
  3. Toute pièce justifiant la situation (bilans orthophoniques, psychologiques, attestations SESSAD, bulletins scolaires, etc.)
  4. Une copie d’un justificatif d’identité et de domicile

Il est fortement conseillé de se faire accompagner (assistante sociale, associations spécialisées, référent handicap de la mairie, etc.) surtout pour le premier dossier ou une situation complexe (APF France handicap, Unafam, etc.).

Trois moyens de dépôt

  • Par voie postale (adresse de la MDPH de son département)
  • Directement sur place, sur rendez-vous, pour déposer et échanger avec l’accueil
  • En ligne dans la majorité des départements (services numériques en expansion, 59 départements couverts fin 2023 - Source : CNSA)

L’évaluation par la MDPH : une procédure personnalisée

À réception, le dossier est étudié par une équipe pluridisciplinaire (médecin, travailleur social, psychologue, etc.) qui analyse la demande en lien avec le projet de vie exprimé dans le dossier. Lors de cette étape, la personne peut être invitée à un entretien, à fournir des pièces supplémentaires ou à rencontrer des membres de l’équipe d’évaluation.

La MDPH s’appuie sur la Classification Internationale du Fonctionnement, du handicap et de la santé (CIF), qui prend en compte l’impact « global » du handicap, pas seulement un diagnostic médical. On évalue l’autonomie dans les gestes du quotidien, la mobilité, la communication, la gestion des repères, les restrictions sociales ou scolaires…

Bon à savoir : En 2022, le délai moyen de traitement d’un dossier MDPH en France était de 4,9 mois, mais il existe de fortes variations (de 1,5 à plus de 10 mois selon les départements – Source : CNSA 2023).

Quels droits ou aides reconnaître ?

Le même dossier permet de demander :

  • L’Allocation Adultes Handicapés (AAH, plus de 1,27 million de bénéficiaires en 2023 – Source : DREES)
  • La Prestation de Compensation du Handicap (PCH), pour couvrir des besoins humains, techniques, transport, logement
  • La Reconnaissance de la Qualité de Travailleur Handicapé (RQTH)
  • La Carte Mobilité Inclusion (CMI) pour priorité, stationnement ou accompagnement
  • Des mesures d’orientation, aménagement scolaires ou professionnels

Échanger avec la MDPH : conseils pratiques pour chaque étape

  • Soigner le projet de vie : il s’agit de l’espace dans lequel la personne exprime ses besoins, aspirations, souhaits d’autonomie, d’inclusion. C’est un élément central du dossier, qui guide l’évaluation. Il vaut mieux détailler avec des exemples concrets (difficultés au travail, aménagements en classe qui ont fonctionné, besoins pour se déplacer, impact sur la parentalité…), y compris avec le soutien de professionnels ou associations.
  • Se préparer à l’attente : noter que les délais sont souvent de plusieurs mois ; la relance par mail ou téléphone est légitime si besoin (surtout si une situation d’urgence ou d’aggravation intervient en cours de traitement).
  • Demander une notification écrite : toute décision doit être notifiée par courrier ou sur le portail numérique. La décision est souvent valable un à cinq ans (variable selon les situations et les droits).
  • Oser formuler un recours si nécessaire : en cas de refus ou d’accord partiel, il est possible (et fréquent) de contester la décision dans les 2 mois : d’abord par un recours administratif préalable obligatoire (RAPO) auprès de la MDPH, puis, si besoin, auprès du tribunal administratif. De nombreuses associations proposent des permanences pour cet accompagnement.

Les difficultés et leviers pour faire valoir son handicap

Les demandes auprès de la MDPH souffrent parfois de lenteurs, de complexité ou d’inégalité selon les territoires. À Caen, par exemple, le collectif « Mobilisés pour Vivre Autrement » recueille de nombreux témoignages de familles démunies face à la complexité des documents ou au manque de lisibilité des réponses.

  • Le « non-recours » au droit : En 2023, plus de 35 % des personnes éligibles à des droits MDPH n’avaient pas fait de demande (Source : Observatoire des inégalités). Causes principales : méconnaissance, lassitude, sentiment d’inutilité de la démarche.
  • Fragilité des projets de vie « scolaires » : De nombreux parents d’enfants en situation de handicap n’osent pas revendiquer des adaptations scolaires, alors que la MDPH est l’unique guichet d’accès aux AESH, à l’ULIS, au SESSAD, etc.
  • Effet d’annonce et effets réels : Être reconnu par la MDPH n’ouvre pas toujours immédiatement à tous les droits demandés. Certaines aides nécessitent des évaluations ou des démarches complémentaires (notamment la RQTH et l’AAH).

Après la reconnaissance : quels impacts et quelles perspectives ?

Une fois la décision de la MDPH notifiée, elle est déterminante dans la vie courante : demander un aménagement du temps de travail, un tiers temps aux examens, des aides humaines à domicile, une place en établissement spécialisé, ou encore bénéficier de tarifs réduits dans certains services publics. Cette reconnaissance actée par la MDPH officialise les besoins du bénéficiaire et devient la clé d’entrée pour d'autres accompagnements (CAF, Pôle emploi, Assurance Maladie, Crous, etc.).

Néanmoins, la notification obtenue s’accompagne d’une nécessaire vigilance : droits qui évoluent avec l’âge ou l’état de santé, démarches à renouveler à terme, contrôle accru pour certaines prestations (comme l’AAH ou la PCH). Ce suivi n’est pas uniquement administratif : des rencontres ou des réévaluations sont parfois organisées pour ajuster les droits à la situation réelle.

Depuis quelques années, plusieurs évolutions sont en cours pour simplifier et accélérer les réponses : reconnaissance de certains droits « à vie » quand le handicap est irréversible, dossier MDPH en ligne et échange d’informations avec la Caisse d’Allocations Familiales, harmonisation accrue des procédures. La voie reste encore à parfaire, notamment sur les délais et la personnalisation des réponses, mais de réels progrès sont constatés localement.

Pour aller plus loin : ressources et accompagnements utiles

  • Le site officiel mdph.fr propose une carte de toutes les MDPH et un ensemble de FAQ récentes.
  • La CNSA publie chaque année un rapport très détaillé sur les délais, les droits ouverts, la statistique par département : Rapport CNSA 2023.
  • À Caen, la Plateforme d’accompagnement des usagers MDPH (rue Rosa Parks) permet d’obtenir un conseil physique et un soutien dans l’élaboration du projet de vie.
  • Les associations APF France handicap, Unafam, Autisme France, et la FNATH proposent une veille juridique et des groupes de parole pour toutes les démarches de reconnaissance ou de recours.

Obtenir la reconnaissance de son handicap par la MDPH, c’est l’étape préalable pour accéder à des droits, gagner en autonomie et participer pleinement à la vie sociale. La démarche reste parfois dense, mais personne n’est obligé de la traverser seul : solliciter des relais, croiser les expériences, s’informer et s’entourer, c’est déjà avancer vers une société plus inclusive et solidaire.

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